Repenser l’école de demain : L'Afrique comme hypothèse, par Gilles Babinet

Co-écrit avec Stéphan-Eloïse Gras, CEO et cofondatrice, et toute l’équipe d’Africa 4 Tech

 Avec 200 millions d’habitants âgés de 15 à 24 ans, l’Afrique est aujourd’hui le continent le plus jeune de la planète. Ces jeunes africains seront les futurs leaders et la force motrice du développement économique, social et culturel du continent. Un système éducatif performant et accessible à tous est donc essentiel pour permettre à la jeunesse africaine d’acquérir les connaissances et les compétences nécessaires pour faire face aux défis de demain.

 

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 Des avancées notables…

 

Depuis plusieurs années les gouvernements et les grandes institutions de la planète essayent de mettre en place un système éducatif correspondant aux challenges du continent africain. Des efforts considérables ont été entrepris pour rattraper le retard accumulé dans ce secteur crucial, en permettant d’améliorer de façon spectaculaire l’accès à l’éducation de base. Ainsi, à titre d’exemple, depuis les années 2000, quinze pays d’Afrique Sub-saharienne ont choisi d’abolir les frais de scolarité dans les écoles primaires, ce qui a consenti à faire progresser le taux de scolarisation de 58% à 76% [1].

 

 … mais des limites persistantes

 

 Toutefois, des inégalités fortes persistent d’un État à l’autre, entre filles et garçons, entre zones urbaines et rurales… Les pays africains restent confrontés à des défis de taille dans le domaine de l’éducation : le surpeuplement des classes, le manque de suivi pédagogique et la formation pédagogiques, l’accès reduit à l’enseignement secondaire et supérieur. Ainsi, moins de 9% des enfants scolarisés en moyenne accèdent à l’université!

 

 Les approches de capacity building et les politiques publiques privilégiées jusqu’à aujourd’hui montrent leurs limites, en pleine transformation numérique du monde et en particulier en plein leapfrog africain.

 

L’innovation numérique et mobile en Afrique aide à repenser l’école de demain et la formation tout au long de la vie…

 

 Les EDTech jouent sans conteste un rôle crucial et contribuent déjà aujourd’hui à favoriser une éducation équitable et à disposition de tous grâce au développement d’outils pratiques tels que les cours en ligne (Moocs et Spocs), les tablettes éducatives, l’assistance aux étudiants… Tant en Afrique anglophone qu’en Afrique francophone, un nombre grandissant de startups proposent des solutions innovantes, concrètes et à moindre coût, contribuant à la réinvention de l’école de demain.

 

 Par exemple, Succès Assuré est une plateforme éducative ivoirienne gratuite pour les élèves du CP à la classe de Terminale, qui propose du soutien scolaire via des capsules vidéos. Plus localement, la startup Marocaine My Virtual Learning Environment propose également une solution pour les écoles et universités de petite et moyenne taille réticentes à passer au e-learning, grâce à un produit à l’identité et au prix plus accessible… L’accès au hardware bien sûr reste un enjeu de taille: outre l’initiative One Laptop Per Child, qui a permis au gouvernement de Kigali de livrer 267.000 ordinateurs portables à plus de 930 écoles rwandaises, on peut citer la tablette VMK du congolais Vérone Mankou, ou encore la tablette éducative Qelasy de l’ivoirien Thierry Ndoufou. L’émergence de produits et de services made & designed in Africa est essentiel à l’émergence d’un modèle éducatif vernaculaire contemporain, adapté aux usages et aux défis locaux…

 

 Accompagner l’émergence d’outils et de contenus numériques vernaculaires

 

 Les campus virtuels déferlent un peu partout sur le continent et proposent des modules de e-formation (Moocs, Spocs, M-learning) ainsi qu’un suivi pédagogique et administratif complètement dématerialisé. Au Ghana depuis 2015, grâce à un partenariat avec Microsoft, le corps enseignant et les étudiants sont équipés de tablettes et ordinateurs portables. Là aussi, tout l’enjeu réside dans l’accès à des savoirs-faire permettant de développer des infrastructures technologiques adaptées, afin d’éviter les phénomènes de tropicalisation ou, pire, de cannibalisme des marchés éducatifs locaux. L’exemple de l’outsourcing du système éducatif du Libéria à Bridge international suscite bien des interrogations à ce titre…

 

 Améliorer la qualité de l’enseignement primaire, développer des infrastructures éducatives et pré-scolaires pour mieux mailler les territoires, faciliter l’accès aux curriculums et aux contenus pour le secondaire et le tertiaire, valoriser des formations diplômantes sur toute une vie pour structurer l’accès à l’emploi, garantir l’accès à une formation de qualité aux populations vivant dans les zones rurales, promouvoir et préserver des savoirs locaux et ancestraux…

 

 Le numérique, utilisé à bon escient, n’est pas qu’une solution permettant de répondre aux défis auxquels font face les systèmes éducatifs africains, comme partout ailleurs dans le monde. Il doit être également un modèle pour le capacity building et l’éducation, afin de favoriser l’autonomisation via la production de contenus vernaculaires et collaboratifs, l’interdisciplinarité, l’agilité, nécessaires au monde qui vient.

 

 Cette volonté de repenser les modèles éducatifs traditionnels depuis l’Afrique et le numérique est la raison d’être du projet Africa 4 Tech, dont l’objectif est de développer des programmes online (Moocs, Spocs, M-learning), des laboratoires et des programmes pédagogiques dédiés afin d’accompagner l’émergence d’un modèle d’innovation et de management africain, à la croisée des nouvelles techniques et des nouveaux savoirs numériques.

 

 Stephan Eloise Gras @stephaneloise et Gilles Babinet @babgi

 

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